Assemblée Générale 11 février 2023

Réunion pour présenter le bilan de l’année 2022 et les activités 2023 que vous trouverez dans la rubrique programme des activités.
La journée à Versailles aura lieu le mercredi 27 septembre et le groupe de 25 personnes est complet, ce qui prouve l’intérêt des adhérents pour cette sortie.
Nous avons eu une intervention de Monsieur Bruno Guignard, responsable du fonds ancien de la bibliothèque Abbé Grégoire de Blois, sur Mgr de Thémines, évêque de Blois de 1776 à 1791. Il a traversé la tourmente révolutionnaire, a été chef de la petite église anti-concordataire, collectionneur d’oeuvres d’arts et grand bibliophile. Personne contemporaine du Maréchal de Rochambeau avec qui il a eu quelques échanges épistolaires.

Préparation des décors pour le dîner du 23 juin

Dîner des Amis de Rochambeau

Soirée au goût versaillais dans le puisard….

Nous étions 85 à profiter de la fraîcheur des lieux à la fin de cette chaude journée, moment convivial avec lecture théâtrale, magicien, rappel historique sur les signatures des traités de Paris et Versailles le 3 septembre 1783.

Cérémonie d’hommage au Maréchal de Rochambeau 1er juillet 2023

Deux dates du mois de juillet sont importantes pour l’association: 1er juillet naissance de Jean-Baptiste de Rochambeau à Vendôme, 4 juillet signature de la Déclaration d’Indépendance des Etats-Unis d’Amérique à Philadelphie.

C’est pourquoi nous rendons hommage au Maréchal à cette période de l’année.

Nous avons eu le plaisir, à cette occasion, d’accueillir Monsieur le Sous-Préfet, Monsieur le député Christophe Marion, le colonel Sommier de la base aérienne de Romorantin et DMD,  la vice-présidente du Conseil départemental Madame Foucher-Maupetit, Monsieur le maire de Thoré-la-Rochette, Monsieur le maire de Villiers-sur-Loir et Monsieur Mike Ward ancien député du Kentucky au Congrès Américain, sans oublier la présence fidèle des membres du régiment du Soissonnais qui n’ont pu à cause du temps tirer la salve prévue, nous les remercions tous pour leur présence.

Odell House Rochambeau Headquaters

La rénovation se poursuit selon le programme établit.

Une journée festive a eu lieu le 20 mai dernier ainsi que sur d’autres sites où les troupes avaient leurs campements.

Jour de pluie, le seul du mois! malgré cela, 80 personnes sont venues voir le musée éphémère, rencontrer le général de Rochambeau et apprendre à fabriquer une maquette en papier de la maison créée par Pierre Fontaine.

Plus d’informations sur: https://www.odellrochambeau.org

Une fête se prépare à Newport (Rhode Island) pour les 14 et 15 juillet

Regardez la vidéo: https://youtu.be/Bn6qylXw5Kk

The Washington-Rochambeau Revolutionary Route National Historic Trail

Le Docteur Robert A. Selig nous a fait parvenir un excellent article qu’il a écrit dans la revue de Newport pour expliquer les raisons qui ont conduit à la création de la Washington-Rochambeau Route National Historic Trail. Pour cela, des témoignages de la vie lors de la Grande Marche des troupes Franco-Américaines et les démarches pour aboutir à la loi de reconnaissance signée par le Président O’Bama.

(La traduction est une traduction informatique)

Résumé de l’article de Robert Selig sur WARO et vie dans la société américaine au XVIIIème siècle.

 

Introduction

Dans une interview publiée dans American Heritage en 1999, le regretté David McCullough a affirmé que : « Quand vous travaillez sur la guerre d’indépendance, comme je le fais maintenant, vous vous rendez compte de ce que les Français ont fait pour nous. Nous n’aurions pas de pays sans eux. » 1 Peu d’historiens des deux côtés de l’Atlantique contestent la vérité fondamentale de cette affirmation.

Alors que les États-Unis se préparent à fêter le 250e anniversaire de la Déclaration d’indépendance en 2026, de nombreux Américains ne sont pas conscients des multiples contributions et aides apportées à l’Amérique par les Français alliés à la victoire dans la guerre d’indépendance. Le soutien français a pris de nombreuses formes – fonds, armes et munitions, officiers qualifiés en artillerie et en cartographie, protection des voies de navigation et des convois par les navires de guerre Français, pour ne citer que quelques exemples. Le soutien plus visible, et finalement décisif, date de juillet 1780 avec l’arrivée d’une armée française d’environ 5 000 officiers et soldats sous le commandement de Jean-Baptiste Donatien de Vimeur, comte de Rochambeau, à Newport, Rhode Island. C’est l’endroit où ils sont restés stationnés le plus longtemps pendant leur séjour de trente mois aux États-Unis. Newport présenta les troupes de l’expédition particulière, nom de code pour le déploiement des forces françaises au Nouveau Monde, à la société de la Nouvelle-Angleterre, potentiellement la région des États-Unis la plus hostile à la France.

Pourtant, au moment où les officiers et les hommes de Rochambeau marchaient et s’embarquaient pour Providence en juin 1781 en route vers New York et éventuellement jusqu’en Virginie, les rencontres pleines de préjugés et d’idées préconçues faites dans les salons de Newport étaient remplacées par des amitiés authentiques qui ont parfois duré des vies. « Je viens de voir par ma fenêtre les derniers hommes de l’armée française embarquer », écrit Mary Robinson en larmes à Louis-Marie, vicomte de Noailles, second colonel du régiment d’infanterie de Soissonnois, le 21 Août 1781. Noailles avait passé l’hiver dans la maison familiale des Robinson sur Washington Street et à l’insu de Mary était déjà quelque part dans le nord du New Jersey en route vers Yorktown.2

Deux jours plus tard, le 23 août 1781, Jacques Melchior Saint-Laurent, comte de Barras, s’éclipsa hors de Newport pour la Virginie avec une flotte de neuf navires, dont sept navires de ligne. Ils transportaient 480 fantassins, 130 soldats d’artillerie et l’artillerie de siège, « les derniers vestiges de l’armée française ». Après les mois d’hiver dans le Rhode Island et Connecticut, les troupes de Rochambeau quittent Newport à la mi-juin 1781 pour rejoindre George Washington et l’Armée Continentale dans ce qui est aujourd’hui la ville de Greenburgh dans le nord du comté de Westchester, New York, au début de juillet 1781. De là, les armées combinées vont descendre vers Yorktown en août et en septembre. En parallèle, les forces terrestres et navales françaises sous le commandement de Claude-Anne de Rouvroy, marquis de Saint-Simon-Montbléru et l’Amiral François Joseph Paul, comte de Grasse, vont aussi dans la même direction venant du sud et tous participeront à la reddition de Charles Comte Cornwallis le 19 octobre 1781.3

Près de 230 ans plus tard, le 30 mars 2009, le Président Barack Obama a signé une Loi désignant les voies terrestres et fluviales empruntées par les armées de Washington et de Rochambeau à destination et en provenance Yorktown en 1781 et 1782 route historique nationale (NHT) en tant qu’unité du National Park Service des États-Unis (NPS). La signature par le président Obama de la loi publique n° 111-11 annonçait la conclusion d’un effort de plusieurs décennies déclenché par le renouveau de la fraternité d’armes de la guerre d’indépendance franco-américaine sur les champs de bataille de France pendant la Première Guerre mondiale. La Washington-Rochambeau Revolutionary Route National Historic Trail, WARO dans National Park Service, ne concerne pas le siège et la victoire à Yorktown.

C’est l’histoire des mouvements de l’armée continentale et des forces françaises de New York et de la Nouvelle-Angleterre sur un réseau de voies terrestres et fluviales plus de 965 km de long dans un corridor géographique, qui, à certains endroits a plus de 16 km de large, jusqu’à Yorktown et retour, et comprend le départ des dernières forces françaises hors de Philadelphie en mai 1783.

C’est l’histoire de l’interaction de soldats américains et français entre eux et avec des civils américains, dont beaucoup n’avaient jamais rencontré un Français avant.

C’est l’histoire de « faire connaissance » les uns les autres, répétés des milliers de fois sur la route de la Virginie. Cela permet de mettre l’accent sur la campagne de 1781 en tant qu’expériences diverses, régionales et interculturelles, pendant que les soldats de la Nouvelle-Angleterre marchaient vers le Maryland et la Virginie, ils ont été témoins de l’asservissement des gens à une échelle beaucoup plus importante que dans leur État d’origine. De telles expériences ont formé un élément intégral dans le développement de l’identité nationale Américaine. Simultanément la marche vers la Virginie fait également partie d’une expérience franco-américaine transatlantique interculturelle : les Américains étaient Américains parce qu’ils n’étaient PAS Français. Vous apprenez qui et ce que vous êtes, aussi, en reconnaissant qui et ce que vous n’êtes pas.

WARO (Washington-Rochambeau Revolutionary Route, national Historical Trail) n’est pas seulement l’histoire des contributions de la France, mais aussi des milliers de citoyens des États-Unis qui ont fourni de la nourriture, du bois de chauffage, et des services de transport aux troupes voyageant des centaines de kms à travers leurs États jusqu’à Yorktown et la victoire le 19 octobre 1781. En mettant l’accent sur les contributions d’Américains inconnus, WARO montre que non seulement la campagne de Yorktown, mais la guerre en tant que telle, était une entreprise nationale. Son succès dépendait des ressources et du soutien de milliers de citoyens ordinaires. En tant que réseaux terrestres et maritimes, WARO est particulièrement qualifié pour démontrer que la guerre d’indépendance n’a pas eu lieu juste à Boston ou Valley Forge, mais a eu un impact sur l’ensemble du territoire des États-Unis naissants. WARO représente l’aboutissement des contributions de la France à l’égard de l’indépendance Américaine; par la participation de la France, la guerre a pris un caractère global. La Victoire à Yorktown finalement a conduit à la fin des opérations militaires majeures aux États-Unis, mais le conflit s’est poursuivi aux Antilles, en Afrique et en Inde, jusqu’à ce qu’il aboutisse finalement au Traité de Paris du 3 septembre 1783.

Expérience franco-américaine

Alors qu’ils débarquaient à Newport en juillet 1780, les officiers et les soldats Français se sont retrouvés dans un Nouveau Monde potentiellement hostile, habité par des gens avec des habitudes, des coutumes et une alimentation qui leur étaient inconnus. Si les soldats français savaient peu ou rien sur les Américains, les Américains de leur côté savaient tout aussi peu de choses sur leur nouvel allié. Beaucoup n’avaient même jamais rencontré un Français. L’année suivante, en route vers le sud entre Plainfield à Windham dans le Connecticut le comte de Lauberdière s’arrêta à Canterbury, une communauté de huit ou dix maisons, où il « passa l’après-midi très agréablement avec un propriétaire terrien de la campagne [sic]. » Le monsieur « était venu là pour voir passer l’armée française » mais était apparemment arrivé trop tard. « Il a une telle idée des Français » que Lauberdière a dû « lui assurer qu’il en était vraiment un, il ne voulait pas me croire, et m’a dit que je devais être écossais, que j’étais trop blanc (c’est-à-dire à la peau claire) pour un Français. » Cet homme pensait aussi que Lauberdière était trop gentil pour être Français: il savait que « les gens de France n’étaient ni si poli et n’avaient pas de si belles manières. Le jeune comte a fait de son mieux pour convaincre le monsieur que « tous mes compatriotes ont la même honnêteté envers le monde entier, et même envers les Anglais une fois qu’ils sont devenus nos prisonniers. » Le Tory du Connecticut heureux d’entendre cela, « puisqu’il était sur le point de retourner voir ses voisins et qu’il pourrait les détromper de leurs faux préjugés, qu’il était ravi d’avoir l’occasion de nous rendre justice et qu’il oublierait pour toujours les idées fausses qu’on lui avaient inculquées (les Anglais) contre nous. Nous nous sommes séparés comme les meilleurs amis. » 4 La plupart des Américains en 1775 considéraient généralement leur allié français en termes négatifs, un ennemi traditionnel plutôt qu’un nouvel ami.

Douze ans d’amitié précaire depuis la Paix de Paris en 1763 n’avait pas fait grand-chose pour éradiquer les vieux préjugés enracinés dans une longue tradition de puritains et d’émigrés Huguenots contre le catholicisme, nourri pendant un siècle de propagande de guerre britannique, et renforcée sur les champs de bataille du Canada.5

Les soldats français savaient qu’ils n’iraient aux États-Unis qu’une seule fois, et qu’il y avait beaucoup à apprendre pour raconter à leurs familles et amis à leur retour en Europe. C’est dans cette expérience diversifiée, transatlantique et interculturelle qui nous en apprenons moins sur les Français que sur la vie et la société de l’Amérique révolutionnaire.8

À l’arrivée à Newport, certains officiers français attendaient un accueil chaleureux et ont fait part leur déception. William de Deux-Ponts se plaint que les Français n’avaient « pas reçu cet accueil au débarquement que nous attendions et que nous aurions dû avoir. Une froideur et une réserve me paraissent caractéristiques de la nation américaine. » 9  André Amblard d’autre part, un enrôlé dans le régiment de Soissonnois, se rappelait que le 12 juillet “tout Le monde était dans Les rues, qui par leurs danses et leurs acclamations de joie formait un très joli spectacle. » 10 Des officiers français de haut rang s’attendaient à une effusion de patriotisme et de sacrifice de la part de leurs alliés pour la cause commune et étaient incapables d’expliquer son absence. Cette réticence au sacrifice était principalement apparente dans l’approche américaine de l’argent. Rochambeau se sentait « à la merci des usuriers ». 11 Axel von Fersen, un autre aide de camp de Rochambeau, évacua des mois de frustration en janvier 1781 lorsqu’il écrivit de Newport à son père que, l’esprit de patriotisme n’existe que chez le chef et les hommes de la campagne, qui font de très grands sacrifices; le reste, qui représente la grande masse, ne pense qu’à ses intérêts personnels. L’argent est l’idée dominante dans toutes leurs actions. [Ils] nous surfacturent sans pitié… et nous traitent plus comme des ennemis que des amis. … Leur cupidité est inégalée, l’argent est leur Dieu; vertu, honneur,  ne comptent pour rien pour eux par rapport au métaux précieux.12

Pourtant, c’est précisément parce qu’ils avaient de l’argent que les forces Françaises ont été bien accueillies par les populations locales même en Nouvelle-Angleterre. Les Français, ou plutôt leurs acheteurs, payaient en espèces plutôt qu’en dollars continentaux sans valeur. Le 31 décembre 1781, John Jeffrey écrit à Jeffrey. Whiting de Hartford: « L’argent est très rare parmi les gens en général, leurs prières quotidiennes sont que l’armée française puisse  bientôt revenir dans la partie du monde où l’argent peut circuler à nouveau parmi eux. 13

La nouvelle de l’arrivée de Rochambeau se répandit rapidement sur la côte Est et à l’intérieure des frontières américaines. Au cours d’une Conseil à Schenectady le 16 août, Général Schuyler a suggéré que les Oneida, les Tuscarora et les Cayuga envoient une délégation à Newport dans l’espoir que le rétablissement des liens franco-indiens de longue date pourraient également renforcer la position américaine parmi les peuples autochtones le long de la Rivière Mohawk.14 Moins de deux semaines plus tard, le 29 août, une délégation de 14 Oneida et Tuscarora et cinq Mohawks de Kahnawake près de Montréal dirigé par le Mohawk Louis/ Atayataronghta, qui a occupé une commission en tant que lieutenant-colonel Continental est arrivé à Newport pour une visite de cinq jours.

Rochambeau les a accueillis avec les honneurs, leur a donné une démonstration de la puissance militaire française, et a échangé avec eux des cadeaux tels que médailles, couvertures, mousquets et épées Le 30 août, il emmena les visiteurs sur le bateau amiral de Monsieur de Ternay où il y a eu des de coups de canon. La visite est décrite en bonne place dans de nombreuses revues françaises : peu d’officiers et aucun des hommes enrôlés n’avaient jamais vu un Amérindien et ils étaient fascinés.

Sur cela, comme pour pratiquement tous les aspects du Nouveau Monde, les remarques ont été différentes en fonction du statut social de l’observateur. Des officiers comme le baron Closen ou Claude Blanchard emploient des termes tels que « visages horribles et singuliers » et « manières bizarres » et des adjectifs tels que « répugnant » lorsqu’ils décrivent les Indiens16 . Georg Daniel Flohr, enrôlé dans le Royal Deux-Ponts, utilisait un langage beaucoup plus neutre, par exemple lorsqu’il décrivait leurs services religieux comme « Gottesdienst » ou « service divin », terme qu’il aurait également utilisé pour un service religieux chrétien.

L’un des interprètes qui accompagnait les Oneida était né en Allemagne. Flohr a rencontré cet homme, identifié par Closen comme un dénommé « Frey », originaire de Schwetzingen.et qui vivait avec les Indiens depuis 1758. Dans une taverne de Newport, Frey raconte à Flohr les détails de sa vie avec les Oneida, « il était originaire du Palatinat et son père avait émigré en Amérique et l’avait emmené avec lui lorsqu’il était petit garçon et à cause de la mort de son père, il s’était retrouvé parmi les sauvages et cela depuis 23 ans, maintenant, voulait rester avec eux », ou, selon les mots de

Closen, « qu’il finirait ses jours parmi eux ». 17

Les hommes enrôlés comme Georg Daniel Flohr, n’étaient pas habitués à une nourriture plus raffinée, n’ont pas eu de mal à s’adapter au régime alimentaire en Nouvelle-Angleterre. Des officiers comme le capitaine François-Ignace Ervoil d’Oyré, ingénieur dans l’armée de Rochambeau, a noté que la seule céréale cultivée en Rhode Island était le « maÿs […] dont les habitants font une sorte de pain mal cuit et lourd (« mal cuit et pesant »)18 Flohr trouvait le pain, même avec la farine de maïs, « très bon ». Les hommes enrôlés avaient peu d’occasions de dépenser leur salaire et avaient peu en contact avec les étranges manières de table, ou l’incapacité à danser avec grâce comme ils auraient pu attendre des Américains.19 Ils ont cependant observé les normes sociétales de l’Amérique révolutionnaire et les ont trouvées à leur goût, à tel point que, sur leur chemin vers le sud, des centaines de camarades de  Flohr ont déserté pour aller dans un environnement germanophones.20

Comparée à la France, la société de la Nouvelle Angleterre était assez égalitaire: en 1782, le voyageur français Hector St. John de Crèvecœur a observé que « les riches et les pauvres ne sont pas aussi éloignés les uns des autres ici qu’en Europe ». Il définissait l’Américain comme quelqu’un qui a laissé « derrière lui tous ses anciens préjugés et ses anciennes manières, » qui ne voit pas de raison de s’incliner devant quelqu’un parce qu’il porte des épaulettes ou a un titre de noblesse.21

Cela s’appliquait avant tout aux relations entre militaires et civils.  Les paysans français n’ont pas le droit de remettre en question les actions d’un noble servant comme officier de l’armée, mais en Amérique, les règles de la guerre étaient différentes, comme l’a souligné le chevalier de Coriolis dans une lettre adressée à son père :

Ici, ce n’est pas comme en Europe, où, quand les troupes sont en marche, on peut prendre des chevaux, des chariots, on peut émettre des remarques pour le logement et, avec l’aide d’un gendarme, surmonter les difficultés que l’habitant pourrait faire ; mais en Amérique, les gens se disent libres et, si un propriétaire n’aime pas votre visage, vous dit qu’il n’en veut pas vous loger, vous devez aller chercher un gîte ailleurs. D’où les mots : « Je veux mettre fin à l’affaire et il n’y a pas de recours possible ».22

Le vicomte de Tresson, capitaine du Saintonge, dit à son père avec dégoût : « Ici, ils ont plus de respect pour un malotru que pour un duc en France « 23. Un colon pourrait faire remarquer à de Tresson qu’ici, en Amérique, nous « n’avons pas de princes pour lesquels nous travaillons, nous mourons de faim et nous saignons « 24 , un tel langage est une abomination aux oreilles de la noblesse qui pouvait trouver amusant que les rangs de la milice de la  Nouvelle-Angleterre aient des « cordonniers qui étaient colonels » et qui, à leur tour, demandent à leurs homologues français « quel est leur métier en France ». Les officiers français nobles demanderaient toujours que leur soit accordée la déférence à laquelle ils étaient habitués en Europe25 . Cependant, l’esprit d’égalité, de liberté et d’opportunité n’a pas échappé aux membres de la petite noblesse dans les rangs des officiers. Le lieutenant-colonel von Esebeck du Royal Deux-Ponts pensait que « personne ne pouvait vivre plus heureux qu’ici. Il y a ici une liberté comme on n’en trouve nulle part ailleurs. »26

Le trajet jusqu’à Yorktown et retour durant l’été 1781 fut un énorme exploit logistique, des milliers d’hommes et d’animaux ont traversé le New Jersey et la Pennsylvanie jusqu’aux lieux d’embarquement de Plum Point, Baltimore et Annapolis. Une revue des forces françaises le 1er août 1781, juste avant le départ, indique la présence de 4 240 sous-officiers et hommes de troupe.27

A ces chiffres s’ajoutent près de 1 000 serviteurs d’officiers, environ trente-cinq femmes et enfants, ainsi que les chauffeurs et cuisiniers de l’énorme train de chariots français.

La répartition des équipes pour la campagne de Yorktown dans les papiers de Jeremiah Wadsworth daté du 15 décembre 1781 à Hartford, montrent que, entre le 25 août et le 22 septembre, i.e., la traversée du New Jersey jusqu’à Annapolis, Wadsworth a payé 195 attelages de 1 170 bœufs pour transporter des provisions et de l’équipement.28 Il ne s’agit toutefois que du train de chariots « officiel », le train réel aurait pu compter plus de 300 chariots de long. Alors que le train de chariots français quitte Annapolis pour Yorktown le 21 septembre 1781, Berthier écrit que « la Légion de Lauzun, les chevaux d’artillerie et le train de chariots de l’armée formaient une colonne de 1 500 chevaux, 800 bœufs et 220 chariots ». Plus de la moitié de ces chariots sont des chariots privés d’officiers; le train de wagons français « officiel » pour lequel  Wadsworth a gardé le régistre se composait de 110 chariots tirés par 660 bœufs.29 Leur marche a généré d’énormes bénéfices pour l’économie de guerre. L’historien Américain Lee Kennett, estime qu’entre les fonds publics et privés, « les forces françaises pourraient bien avoir déboursé 20 millions de livres en monnaie », ce qui aurait pu doubler le montant de la monnaie circulant dans les treize États. 30

L’énorme exploit que représente le déploiement de tous ces hommes et de leurs animaux en Virginie apparaît plus clairement lorsque l’on garde à l’esprit la petitesse des villages qu’ils ont traversés. En 1781, les colonies comptaient environ 2,5 millions d’habitants; Philadelphie, la plus grande ville, comptait environ 28 000 habitants en 1781, New York City environ 20 000 (sans compter la garnison). Les plus grandes villes suivantes sont Boston avec moins de 16.000 habitants, Charleston avec moins de 12.000 habitants, Baltimore, moins de 7 000 habitants, Providence,

environ 4 500 habitants, et Wilmington dans le Delaware, moins de 1 100 habitants. Pendant quatre jours, en août et septembre 1781, les armées franco-américaines combinées, y compris les serviteurs, les wagons, les femmes et les enfants, entre 8.500 et 8.000 hommes, femmes et enfants, ont campé ou traversé Princeton à une vitesse maximale de 1,5 miles par heure. C’est la vitesse d’un bœuf tirant un chariot. La population de Princeton à l’époque était d’environ 350 personnes, Trenton, à quelques kilomètres plus loin, comptait peut-être une centaine de maisons et environ 500 habitants. Les grands animaux des deux armées environ 2 300 bovins et 2 100 chevaux, soit environ 4 400 animaux. Seule Philadelphie était potentiellement en mesure d’approvisionner les armées sans trop de préparation. Newport comptait 11.000 habitants en 1776, mais le recensement de 1782 n’en compte que 4.015 plus 6 Indiens, 33 mulâtres et 252 Noirs.32

En d’autres termes, l’arrivée des forces de Rochambeau et des hommes de la flotte de Ternay ont presque triplé le nombre d’habitants de Newport.

Les sources primaires françaises et américaines concernant les expériences des soldats sur la Piste se complètent mais rien qu’en termes de volume, il y a plus de trois fois plus de sources d’origine françaises que de sources d’origine américaines. Les sources françaises sont prépondérantes pour connaître l’histoire de la National Historic Trail. Les récits américains ont tendance à se concentrer sur les kilomètres parcourus et les campements, minimisant, voire omettant, les aspects de la vie quotidienne, de la nourriture, des vêtements, des habitudes. Mais il y a bien sûr des exceptions à cette règle. Asa Redington a marché dans l’infanterie légère du colonel Alexander Scammell et se souvenait en 1838 que :

Pendant cette marche, il faisait très chaud, et notre nourriture était pauvre et insuffisante. Nous avions pour chaque homme une livre de farine sèche par jour, avec une livre de bœuf frais très médiocre, abattu chaque jour, et une demie pint de sel pour 100 livres de bœuf. C’était là toute notre subsistance, sans rien d’autre pendant cette longue et pénible marche, et n’ayant d’autre boisson que l’eau des ruisseaux et des rivières qui était très chaude en cette saison. Nous dormions sous des tentes et, chaque matin, nous nous mettions en marche à deux heures précises.  A 5 heures, nous faisions halte et prenions de notre petite ration cuisinée la veille, puis nous marchions jusqu’à midi, ou nous finissions notre ration, s’il en restait dans nos sacs. Ensuite, nous avons marché de 13 heures à 17 heures. À 7 heures, le bœuf était abattu et distribué 60 livres pour 60 hommes. Il était coupé en morceaux et divisé entre les chambrées aussi équitablement que possible, six hommes constituant une chambrée. Les différents morceaux étaient tirés au sort, puis on cherchait un endroit pour faire le feu, ramassions des branchages et nous faisions bouillir le boeuf dans des bouilloires de camp, en ajoutant de la farine pour faire une soupe. Avec le reste de la farine, on ajoutait de l’eau du ruisseau et nous le faisions cuire sur une pierre près du feu de camp. Nous faisions un souper de notre soupe et de la moitié de notre pain, et nous gardions la viande pour le petit déjeuner et le déjeuner du lendemain. Tout cela était une assez petite collation.33

La plupart des officiers et des soldats de l’Armée continentale ne voyaient pas la nécessité de noter les caractéristiques architecturales, l’état des routes, la beauté du paysage ou la préparation d’un gâteau. Tout le monde le savait. L’une des rares exceptions à cette règle, sinon la seule, dans l’histoire de l’échange culturel et de l’expérience régionale intra-américaine sont les observations sur l’esclavage dans des États comme le Maryland et la Virginie. Les Nordistes étaient consternés par la condition des personnes asservies, une attitude qu’ils partageaient avec des soldats Français. Josiah Atkins de Waterbury, Connecticut, servant dans le bataillon d’infanterie légère du Lieutenant-Colonel Gimat écrit le 6 juin 1781 :

nous passons devant la plantation du général Washington, qui est de grande étendue. Certains hommes dans ces régions, me dit-on, possèdent 30.000 arpents de terre pour leur patrimoine, et beaucoup d’entre eux ont deux ou trois cents nègres pour y travailler comme esclaves. Hélas ! Ces personnes qui prétendent défendre les droits de l’homme, pour les libertés de la société, puissent se complaire dans l’oppression et même de la pire espèce. Beaucoup d’esclaves sont sans vêtements, presque sans provisions, n’ont que très peu de choses pour subvenir à leurs besoins naturels »34.

Un wagonnier anonyme de Sutton, Massachusetts note qu’à partir de Fredericksburg, en Virginie, « le pays est très pauvre en nourriture pour les hommes et les bêtes, mais il y a beaucoup de nègres car certains gentilshommes en ont six, sept ou huit cents, et d’autres un millier ces pauvres Noirs sont aussi pauvres que nos porcs ou nos chiens ». Lors d’une visite de certaines plantations de la rivière James, le baron Closon écrivit que le :

grand nombre d’esclaves nègres qu’ils détiennent sont souvent traités très durement et même cruellement, sont presque nus et ne sont pas considérés comme meilleurs que des animaux. Les Blancs croient qu’ils s’avilissent s’ils se livrent aux travaux qui, selon eux, ne conviennent qu’à ces êtres misérables. Je dois faire remarquer qu’en Nouvelle-Angleterre, il n’y a presque plus d’esclaves nègres. En général, le despotisme et l’aristocratie sont la règle en Virginie plus qu’ailleurs. Un beagle, un chien d’appartement, mène très souvent une vie plus heureuse et est bien mieux nourri que les pauvres nègres ou mulâtres. « 35

George Daniel Flohr, membre du Régiment du Royal Deux-Ponts, a également fait état des conditions brutales et déshumanisantes des personnes asservies qu’il a vues dans le haut Sud :

on y voyait aussi en tout temps les personnes noires ou de peau foncée courir partout nus comme Dieu les a créés. En Virginie, il y a généralement les plus riches gentlemen que l’on puisse trouver dans ce pays, qui possèdent jusqu’à 150 et plus esclaves à peau foncée…les femmes blanches n’ont pas honte devant les êtres nus. J’ai souvent demandé pourquoi on ne les habillait pas, car c’était une honte de les laisser aller nus. Ils m’ont répondu : si nous voulions habiller tous ces Noirs, cela nous coûterait cher et tout serait déchiré en 3-4 semaines, et qu’ils ne valaient pas tant que ça. … Nous avons aussi vu que ces Noirs, ce qui m’a laissé très perplexe, sont gardés comme du bétail, et que les jeunes de ces Noirs sont élevés aussi bien à l’état de nature que le jeune bétail ; plus ils ont de petits, plus leur maître [qui] les possède les aime ainsi. De diverses manières ils sont maintenus à l’état de nature, quelque chose que je ne veux pas décrire ici en détails, car c’est tout à fait contraire à la nature humaine.36

Aliments inconnus et normes sociétales inimaginables en France, des personnes asservies vivant dans des conditions horribles mais appartenant à des hommes qui prétendaient lutter pour la liberté contre la tyrannie britannique, des Européens qui préféraient vivre avec les Amérindiens – inévitablement appelés « sauvages » ou « Wilde » dans tous les cas – plutôt que dans la société européenne, constituaient les éléments d’un monde nouveau étrange qui apparaissait plein de contradictions pour les troupes françaises. Témoin évaluant une société qui en était venue à dépendre de l’aide française tout en restant méfiante à l’égard de ses alliés était tout l’enjeu du « apprendre à se connaître » qui a commencé à Newport.

A Newport, la méfiance se transforme en amitié et parfois même en amour parfois même en amour. Polly Scott, fille du colonel, George Scott logeur du colonel Christian de Deux-Ponts pendant l’hiver 1780-81, s’éprend du jeune comte.  En septembre 1781, Polly le remercie, dans une grammaire et une orthographe loin d’être parfaites, pour « son agréable faveur », tout en attendant le jour où « mon cher ami reviendra dans mes bras impatients et ainsi je serai à nouveau heureuse ». Après son bref retour à Newport à l’automne 1782, Christian renoue avec elle. À la fin du mois de novembre 1782, Polly écrit à « Oh My Dear friend » qu’elle n’oublierait jamais « l’amitié » de Deux-Ponts à son égard « ni le dernier samedi 23 novembre, restera gravé dans ma mémoire comme le plus heureux jour de ma vie. … Je vous demande de venir encore une fois et si vous ne pouvez pas venir, écrivez-moi au moins une ligne de réconfort, mon cœur est si grand ». Elle l’exhorte à ne pas « oublier ce que vous m’avez promis » – son portrait. Polly était « sûre que vous pourriez trouver un portraitiste à Boston c’est la dernière faveur que je demande à mon … adorable et aimable ami. »37 Nous ne savons pas si Christian lui a jamais envoyé son portrait. Ce que nous savons, c’est qu’il est retourné en France où, sur l’insistance de sa mère, il s’engagea dans un mariage malheureux.

Des observations et des correspondances comme celles recueillies auprès de dizaines de témoins oculaires américains et français le long de la route révolutionnaire Washington-Rochambeau, donnent un visage humain à une histoire potentiellement stérile de la campagne de Yorktown qui, d’après certains récits américains se résumaient à « nous avons marché d’un endroit à l’autre, il pleuvait, nous avions faim ». Ils forment les pièces du puzzle à partir desquelles émerge une image de l’Amérique révolutionnaire à partir des Américains eux-mêmes, aussi bien que de visiteurs venant de l’étranger.

Antécédents récents

La prise de conscience de la collaboration franco-américaine dans la lutte pour l’indépendance américaine s’est éteinte avec les derniers vétérans de cette guerre dans les années 1840. Le très populaire Benson J. Lossing affirmait en 1852 qu' »un bilan des faveurs liées à l’alliance ne montrera pas la moindre prépondérance de services en faveur des Français, si ce n’est le résultat de l’action la plus vigoureuse des Américains, causée par les espoirs de succès de l’alliance, ne soit pris en compte « . 38 L’intérêt dans le rôle et les contributions de la France dans la lutte pour l’indépendance s’est accru temporairement lors des célébrations des centenaires des révolutions américaine et françaises en 1876 et 1889. En 1872, Thomas Balch publie Les Français en Amérique pendant la Guerre de l’Indépendance des États-Unis, 1777-1783. 39 En 1881, Henry P. Johnston publia The Yorktown Campaign and the Surrender of Cornwallis, toujours utile, et Edwin M. Stone fit de même avec Our French Allies …in the Great War of the American Independence (Providence, Rhode Island, 1884). À Paris, Henri Doniol publie entre 1886 et 1892 son Histoire de la participation de la France à l’établissement des États-Unis d’Amérique, Correspondance diplomatique et documents en cinq volumes, toujours indispensable.40 Une fois les commémorations terminées, l’intérêt s’est à nouveau estompé. Le Marins et Soldats Français en Amérique Pendant la Guerre de l’Indépendance des États-Unis, 1778-1783, de Amblard Marie vicomte de Noailles a été publié à Paris en 1903. Soutenu par la Société Française, Fils de la Révolution Américaine, fondée à Paris en septembre 1897, le ministère français des Affaires étrangères a publié en 1903 une liste partielle de noms dans Les Combattants Français de la Guerre Américaine 1778-1783.41

Quelques années plus tard, l’aide et la coopération américaines lors de la Première Guerre mondiale, ont toutefois permis de renouveler une alliance qui avait débuté quelque 140 ans plus tôt. « Lafayette, nous sommes là ! » déclare le lieutenant-colonel Charles Stanton sur la tombe du marquis à Paris le 4 juillet 1917. Le jour de l’Armistice en 1918, la « dette envers Lafayette » est payée. Mais la guerre « là-bas » a également ravivé l’intérêt pour la coopération militaire qui avait eu lieu pendant la guerre d’Indépendance. Pour de nombreux Américains, de Boston à Yorktown, l’expression visible de la contribution française à la victoire américaine en 1783 était les monuments et les plaques commémorant la présence des forces de Rochambeau en 1781 et 1782 érigés au cours des dernières décennies et qui jalonnent leurs États. Ces rappels visibles de la participation française à la guerre d’Indépendance sont devenus le point de départ du banquier de Boston Allan Forbes, qui, au début des années 1920, a eu l’idée de commémorer le rôle de la France en marquant les lieux de campements français en Nouvelle-Angleterre, et en retraçant ainsi les itinéraires empruntés par les troupes de Rochambeau. Forbes et son collaborateur Paul F. Cadman se sont concentrés sur les États du Massachusetts, du Rhode Island et du Connecticut ; leurs recherches s’arrêtent à la frontière de l’État de New York. Les États intermédiaires n’ont fait l’objet que d’un seul article 42. Lorsqu’ils ont publié leur ouvrage France et la Nouvelle-Angleterre en 1925, les auteurs ont indiqué qu’un « effort a été fait pour que la State Park Commission du Connecticut marque l’ensemble des dix-neuf camps de cet État et l’on espère que cela se fera un jour ». 43 Les espoirs de Forbes et de Cadman dans le Connecticut et ailleurs sont restés lettre morte. Trente ans plus tard, les sites n’ont toujours pas été marqués et avec la création d’une « Commission Rochambeau que l’Assemblée générale du Connecticut se saisit à nouveau de la question en 1956.

Cette commission est l’œuvre de Charles Parmer, qui s’est mis en tête de ressusciter la mémoire de la participation française à la guerre d’Indépendance américaine et d’identifier l’itinéraire emprunté par les troupes françaises pour se rendre à Yorktown. Au printemps 1951, Parmer a commencé à solliciter des fonds auprès des gouvernements des États et des sociétés patriotiques. 44   En 1952, les Colonial Dames of Virginia ont approuvé sa proposition d’un marquage uniforme de la route et le 16 janvier 1953, le gouverneur de Virginie John S. Battle nomme Parmer à la tête d’une commission Rochambeau inter-états. Le but est « d’organiser avec les autres États le marquage uniforme de la route » empruntée en 1781 par le général Rochambeau et ses forces françaises (…) et d’organiser une célébration commune de l’anniversaire de la Marche de la Victoire de Rochambeau ». 45

Le 16 avril 1953, Parmer convoque une réunion à Mount Vernon. L’événement est largement relayé par la presse ; le président Dwight D. Eisenhower et le ministre Français des Affaires Etrangères, Georges Bidault, envoient même des télégrammes de félicitations. Parmer est élu président général de la commission inter-états Rochambeau des États-Unis. À l’automne 1953, le Rhode Island, le Delaware, la Pennsylvanie et le Connecticut avaient nommé des commissions ou des représentants pour travailler avec la Virginie. Le Maryland, New York et le New Jersey avaient « des dirigeants de groupes patriotiques qui planifiaient de faire le marquage avec l’autorisation de l’État ». 46 Le rapport de Parmer de 1953 à l’Assemblée générale de Virginie mentionne la Virginie comme l’un des États où « les dirigeants des groupes patriotiques faisaient] des plans pour faire le marquage avec l’autorisation de l’État ».

Cependant, seul le Connecticut s’est chargé d’identifier et de marquer la route de l’armée de Rochambeau. Lors de sa session de janvier 1957, l’Assemblée générale adopta le projet de loi suivant House Bill No. 2005, « loi concernant l’érection de signalisation pour désigner les sites des camps occupés par les troupes françaises sous Rochambeau ». « . Approuvé le 4 juin 1957, cette loi a affecté des fonds et a chargé le State Highway d’ériger des panneaux de signalisation en coopération avec la commission de Parmer et les « sociétés historiques locales ou groupes communautaires fraternels ». Conformément à cette législation, le Connecticut State Highway a placé vingt-sept panneaux sur ou à proximité des campements connus de l’armée de Rochambeau dans l’État dont certains existent encore.47 L’intérêt pour le projet s’est estompé aussi rapidement qu’il était né. Parmer mourut en 1958, peu après l’inauguration du pont de la Quatorzième Street Bridge (I-395 entre le Jefferson Memorial et le Pentagone) sur le Potomac à Washington, D.C., sous le nom de Rochambeau Memorial Bridge en octobre 1958. Son décès a signifié la fin de son projet.48

Histoire législative

Quinze ans plus tard, en 1972, Howard C. Rice Jr. et Anne S. K. Brown ont publié leur étude sur le terrain. Les campagnes américaines de l’armée de Rochambeau, 1780, 1781, 1782, 1783. 49 Le volume 2 contient 204 pages d’itinéraires et de textes suivis de 177 cartes contemporaines, croquis et vues des itinéraires empruntés par l’armée de Rochambeau sur le continent américain et dans les Caraïbes. Ces cartes ont permis d’identifier et d’établir de manière concluante l’itinéraire des forces françaises de Newport à Yorktown pendant l’été 1781 et le retour sur Boston durant l’été et l’automne 1782. Sur la base de ces volumes, le Représentant Hamilton Fish Jr. de New York a présenté le 16 avril 1975 à la Chambre des Représentants la résolution 225. Cette résolution appelle les autorités fédérales, les États, les comtés et les collectivités locales à reconnaître l’itinéraire emprunté par les forces de Rochambeau, tel qu’il est décrit dans l’ouvrage de Brown et Rice comme « The Washington-Rochambeau National Historic Route ».

En janvier 1976, la commission Haley adopte la résolution créant la « Washington-Rochambeau Historic Route ». Le 17 février 1976, la résolution, déclarant la route l’une des réalisations éducatives et patriotiques les plus utiles et les plus durables du bicentenaire de la guerre d’Indépendance américaine », est adoptée sans objection et a été renvoyée au Sénat le 18 février 1976.

Plus de cinq mois plus tard, le 21 juillet 1976, le Département de l’Intérieur a informé le sénateur Henry M. Jackson, président de la commission sénatoriale de l’Intérieur et des affaires insulaires, qu’il n’avait pas d’objection à la Résolution 225. Le 25 août 1976, le Sénat a également adopté la Résolution 225. La résolution 225 commune Chambre-Sénat demandait que les États « par une signalisation appropriée, attirent l’attention sur l’itinéraire », mais n’a pas donné de fonds pour payer les panneaux au-delà des limites du Colonial National Historical Park de Yorktown.

En raison de ce manque de fonds fédéraux, un groupe de citoyens a créé le « Comité Washington-Rochambeau National Historic Route à Yorktown », New York, et a mis en place ses propres panneaux mais peu d’entre eux semblent avoir survécu.51 Quelques années plus tard, en prévision du 200e anniversaire de la campagne de Yorktown, l’Assemblée générale du Commonwealth de Virginie a adopté, le 15 mars 1980, la loi H93 désignant une « route Washington-Rochambeau » de Mount Vernon jusqu’au Victory Center de Yorktown.52 Beaucoup de ces panneaux verts installées pour marquer la route existent toujours.53 Parrainée par l’État du Rhode Island et des Plantations de Providence, , comme on les appelait en 1981, et dirigée par le bureau de l’adjudant général, des reconstituteurs ont suivi l’itinéraire  de Newport à Yorktown du 9 au 16 octobre 1981. 54 Le bicentenaire passé, la question d’une Washington-Rochambeau Trail est retombée en sommeil jusqu’à la fin des années 1990, quand en octobre 1995, le « Comité Inter-Community des Ressources Historiques » de l’Assemblée du Connecticut a commencé son travail d’identification et de classification des emplacements de camps connus en fonction de leur état de conservation et le danger d’une évolution potentiellement destructrice. Sur la base de la législation introduite par la représentante de l’État Pamela Z. Sawyer, au printemps 1998, le Connecticut a alloué des fonds pour que la « route historique Washington-Rochambeau (telle que reconnue par le Congrès des États-Unis) soit inscrite au Registre national des lieux historiques sous le nom de ‘Revolutionary Road’. Simultanément, en juin 1998, une initiative commémorative du National Park Service (Service des parcs nationaux) a débuté dans les régions du Nord-Est et du Sud-Est à l’occasion du 225ème anniversaire de la Révolution américaine pour mieux faire comprendre au public des événements qui se sont déroulés entre 1775 et 1783. En collaboration avec cette initiative, mais de manière distincte sur le plan organisationnel, près de cinquante d’historiens locaux et régionaux et de personnes intéressées par l’histoire, de New York, du New Jersey et du Connecticut se sont réunis au quartier général de Washington à Newburgh, dans l’État de New York le 16 décembre 1999, à l’invitation du colonel à la retraite de l’armée américaine, le Dr. James M. Johnson, pour organiser un comité de la Route Révolutionnaire Washington-Rochambeau. Présidé par Jacques Bossière, professeur émérite de français à l’université de Yale, les objectifs de l’organisation, dont les le nom a été raccourci en W3R selon la suggestion de feu Christian Bickert étaient l’identification et la préservation de la route elle-même et des sites historiques le long de celle-ci au niveau de l’état, et la création d’une route historique nationale pour promouvoir dans chaque état le tourisme patrimonial et l’entretien.

Le comité W3R a rapidement réussi à faire pression pour obtenir des soutiens en faveur du projet. Le 3 juillet 2000, sur le pas de la porte du musée Dean Webb-Stevens à Wethersfield, Connecticut, site de la rencontre historique de mai 1781 entre Washington et Rochambeau, le député John B. Larson a annoncé que le 29 juin 2000, il avait présenté ce qui allait devenir la Washington-Rochambeau Revolutionary Route National Heritage Act of 2000. Le même jour, son projet de loi a été renvoyé à la commission des ressources naturelles de la Chambre des représentants. Il s’intitule « Projet de loi pour demander au Ministre de l’Intérieur de mener une étude sur les ressources de la route de 600 miles qui traverse le Connecticut, le Delaware, Maryland, Massachusetts, New Jersey, New York, Pennsylvanie,  Rhode Island et Virginie, utilisée par George Washington et le général de Rochambeau pendant la guerre d’Indépendance américaine ». Renvoyé à la sous-commission des Parcs Nationaux et des Terres Publiques le 14 août, avec une demande de rédaction du texte par le Ministère de l’Intérieur, le projet de loi est revenu à la Chambre le 23 octobre et a été adoptée.

Le projet de loi de Larson a été reçu au Sénat le 24 octobre 2000, où les sénateurs Joseph Lieberman et Christopher Dodd avaient introduit une Résolution sénatoriale 3209 presque identique le 17 octobre 2000 ; elle a été adoptée à l’unanimité le 27 octobre. La signature du président Bill Clinton le 4 décembre 2000 a donné naissance à la loi publique n° 106-473, une « Loi imposant au Secrétaire de l’Intérieur de mener à bien une étude sur les ressources de la route de 600 miles traversant le Connecticut, le Delaware, le Maryland, le Massachusetts, New Jersey, New York, Pennsylvanie, Rhode Island et Virginie, empruntée par George Washington et le général de Rochambeau pendant la Guerre d’Indépendance ». Contrairement à la législation précédente, ce projet de loi alloue des fonds fédéraux au Service des Parcs Nationaux pour réaliser une étude de faisabilité qui a débuté à la fin de l’année 2001. Une « déclaration de portée nationale » a été achevée au début de l’année 2003;55 l' »étude des ressources et l’évaluation environnementale » ont été soumis au Congrès le 18 octobre 2006.56 Lors de leur réunion du 8 avril 2003, le Comité du cadastre du Bureau des Affaires des Services des Parcs Nationaux a recommandé à l’unanimité qu’une proposition complète sur le W3R soit présentée au Congrès pour un examen final et un vote sur la  désignation en tant que National Historical Trail. Le 20 avril 2005, le NPS a préparé la déclaration de soutien suivante: « Le projet de route révolutionnaire Washington-Rochambeau sera établi par le Congrès en tant que sentier historique national au sein du réseau des sentiers nationaux. Entre Boston et Yorktown, le sentier servira à des fins d’explications, d’éducation, de commémoration et de reconstitution du passé par le biais d’itinéraires récréatifs, routiers et nautiques. » 57 Le 26 juillet 2006, le député Maurice D. Hinchey de New York avait déjà présenté le projet de loi H. R. 5895 « Pour amender la loi sur le Service des sentiers nationaux afin de désigner la Washington-Rochambeau Revolutionary Route National

Historic Trail ». Parallèlement, le sénateur Joseph Lieberman a présenté un projet de loi complémentaire (S 3737) au Sénat, mais le 109e Congrès a expiré en décembre 2006 sans avoir acté le projet de loi.

Le 26 février 2007, le sénateur Lieberman et le sénateur John Warner comme co-sponsor, a introduit la Résolution du Sénat 686, « Pour amender le National Trails System Act et désigner la route Washington-Rochambeau Revolutionary Route National Historic Trail ». Le 1er mars 2007, le député Maurice Hinchey avec Rep. James P. Moran comme co-sponsor a présenté un projet de loi identique sous la forme d’une résolution de la Chambre des représentants (House Resolution 1286). Étant donné que seule la résolution du Sénat est sortie de la commission et a été inscrite au calendrier législatif, aucune autre n’a été prise sur la législation par le 110e Congrès.

Après des auditions au Congrès, le 25 mars 2009 la Chambre des représentants du 111e Congrès a adopté la loi

H.R. 146, « Pour désigner certaines terres comme faisant partie du National Wilderness Preservation System, pour autoriser certains programmes et activités du ministère de l’intérieur et du ministère de l’Agriculture, et l’intérieur et de l’agriculture, et à d’autres fins ». La H.R. 146 comprenait une disposition établissant le WARO. Le Sénat a approuvé le texte avec des modifications mineures et, le lundi 30 mars 2009, la présidente de la Chambre des représentants Nancy Pelosi, a signé le projet de loi. Plus tard dans la journée, le président Barack Obama a signé la loi HR 146, « Omnibus Public Land Management Act » en tant que loi publique n° 111-11. L’article 5204 de cette loi établit la « Washington-Rochambeau Revolutionary Route National Historic Trail » comme une route Nationale Historique faisant partie e NPS (Service des Parcs Nationaux).

Plus de 85 ans après la naissance de l’idée de Forbes et Cadman, le projet abouti enfin !

Il faut maintenant le matérialiser tout au long du trajet.

Visite d’un groupe de l’association à Versailles

Mercredi 27 septembre 2023, une vingtaine de membres de notre association, conduite par notre présidente Nathalie de Gouberville, s’est rendue à Versailles.

Il s’agissait de commémorer la signature du traité de Versailles qui, le 3 septembre 1783, a mis fin à la guerre contre le roi d’Angleterre et consacré l’indépendance des Etats-Unis d’Amérique.

Le matin, nous avons pérégriné à l’intérieur du château à la recherche de souvenirs liés à cette période : nous avons remarqué les beaux tableaux de Van Blarenberghe, sur Yorktown*, le candélabre de l’Indépendance* dans le Cabinet du Roi, ainsi que la petite pièce du « Secret du Roi », où s’est probablement décidé l’envoi de La Fayette en émissaire caché de la Cour de France à la rencontre de Washington. Le clou de la visite était un portrait du Maréchal de Rochambeau par Rivière* et le grand tableau de la bataille de Yorktown par Couder* dans la majestueuse Galerie des batailles.

L’après-midi, un conférencier fort érudit nous a conté l’histoire de la ville et du château et fait découvrir la vieille ville, la salle du jeu de Paume, lieu majeur de l’histoire de la Révolution française, avant de nous présenter la galerie du Ministère des Affaires étrangères, œuvre de Berthier, père du Maréchal de Napoléon, où Vergennes et Benjamin Franklin ont préparé la signature des deux traités concomitants, de Versailles et de Paris de 1783, qui ont marqué le triomphe de la France de Louis XVI sur l’Angleterre de Georges III.

*Vous pouvez retrouver cela sur les photos jointes ainsi qu’un détail de la gouache de Van Blarenberghe représentant le cheval de Rochambeau se reconnaissant à ses armes dessinées sur le selle.

14 août 1781

Message de Bob SELIG du 14 août 2023

« Aujourd’hui, étant le 242ème anniversaire de l’une des dates les plus importantes de l’histoire américaine et mondiale, je me permets de vous envoyer un récit (quelque peu long) des événements de l’après-midi du 14 août 1781, qui se sont déroulés soit au quartier général de Rochambeau à Odell house ou au quartier général de Georges Washington à Apple Bay House dans la ville de Greenbird, Comté de Westchester »

 

14 AOÛT 1781 ET LA DECISION DE SE DEPLOYER VERS LA VIRGINIE

Le 26 juillet 1781, le secrétaire particulier de W Jonathan Trumbull Jr  écrivait à son père, gouverneur du Connecticut :

« Le Général est extrêmement inquiet et se trouve dans une situation ridicule, des plus compliquées, étant dans l’incapacité d’organiser un plan d’opération, à cause de l’incertitude dans laquelle il était quant à la suite des opérations militaires».

Le 27 juillet, jour suivant ce courrier, l’ingénieur en chef Presle du Portail, a commencé à travailler sur le projet d’assiéger New-York « sans le soutien de la flotte française […il] estimait qu’il était possible de réussir sans l’aide de cette flotte à condition d’avoir suffisamment d’hommes et de temps  Il pensait que 20.000 hommes suffiraient. »

Duportail, tout comme Washington et Rochambeau, savaient qu’il ne leur restait pas « beaucoup de temps » dans cette campagne et qu’ils n’avaient pas ces 20.000 hommes, encore moins les provisions nécessaires pour s’embarquer dans une opération de cette taille. Les jours se transformaient en semaines et aucun signal de l’amiral de Grasse, jusqu’à presque trois semaines plus tard, quand, le 14 août, Washington put enfin « se décider sur un plan organisé ».

Mathieu Dumas, un des aides de camp de Rochambeau, était en expédition à la recherche de vivres, écrit dans son journal :

« Il est arrivé ce soir un courrier de Newport, qui en était parti le 12. Monsieur de Barras annonce aux généraux l’arrivée de la frégate la Concorde, partie du cap français le 28 juillet On a interdit d’abord toute communication de la frégate avec la terre ».

La bien nommée « Concorde » avait apporté une lettre de de Grasse, informant Rochambeau et Washington qu’il partait de Saint-Domingue « pour se rendre en toute diligence dans la baie de Chesapeake ».

Le jour suivant, 15 août, Mathieu Dumas écrit dans son journal :

« Il ne s’est rien répandu des détails que les généraux ont reçu par la Concorde et le parti qu’ils ont pris après une conférence de plusieurs heures n’a pas été moins secret. Monsieur de Fersen a été envoyé à Newport ce matin ».

Une réunion de plusieurs heures où Mathieu Dumas n’était pas présent, mais dont le récit fait par le Comte de Lauberdière, un autre aide de camp de surcroît neveu de Rochambeau, ne mentionne pas l’absence…Lauberdière écrit dans son journal :

«Nous cherchions des vivres aux environs de Eastchester le 14 août… Monsieur le Comte de Rochambeau a été informé de l’arrivée à Newport de la frégate La Concorde, qui venait de Martinique, envoyée par Monsieur de Grasse, en réponse aux dépêches que Monsieur de Rochambeau lui avait envoyées par la même frégate au mois d’avril. L’amiral l’a envoyée à notre général, seulement après avoir soigneusement étudié le plan de campagne qui lui avait été adressé et, une fois que les vivres aient été disponibles. Il était d’accord pour embarquer autant de soldats qu’il le pouvait à bord de ses vaisseaux et atteindre la baie de Chesapeake pour aider rapidement la Virginie. Il ferait son possible pour apporter les 1.200.000 Francs qui lui étaient demandés et arriverait dans la baie de Chesapeake avant la fin août.
Monsieur de Rochambeau partit à la rencontre du général Washington pour lui faire part de cette importante et satisfaisante missive. Le Général, qui n’avait que New-York dans son cœur, apparut mécontent, non seulement parce que l’expédition vers la Chesapeake ne lui paraissait pas capitale, mais aussi parce qu’il pensait que la reddition de New-York terminerait la guerre ».

Lauberdière ne dit pas où il trouva Washington ni ne mentionne le lieu de leur conversation, qui, comme Dumas l’a écrit, fut longue : plusieurs heures

Selon Lauberdière, « Washington croyait en la possibilité de mener cette grande entreprise, mais, connaissant la grande répugnance des armées du Nord à se diriger vers le sud, il  craignait que personne ne le suivit. Monsieur de Rochambeau contredit (contra) pied à pied (avec force) tous les arguments, en connaissance des faits. Il finit par lui dire que les choses étaient trop avancées pour revenir en arrière, qu’il était décidé à marcher (advienne que pourra !) avec le corps des Français qui, uni aux troupes promises venant des Iles en nombre suffisant  était prêt à oublier sa propre gloire et qu’il n’avait que le bien commun à l’esprit.

Il le priait instamment de venir en personne en Virginie, où il trouverait Monsieur de Lafayette avec 2.000 hommes, ainsi que des appelés, ce qui ferait le plus grand corps d’armée, et qu’il le servirait toujours avec grand plaisir, en se mettant sous ses ordres.
Le général Washington accepta et se préoccupa de savoir comment convaincre ses troupes de le suivre en plus grand nombre possible.»

L’ingénieur principal français Desandrouins, toujours membre du cercle proche de Washington et Rochambeau, relatait une scène semblable. Dans les extraits de son journal de la guerre en Amérique, on peut lire ces lignes : « Le général Washington qui ne pensait qu’à la prise de New-York ne consentirait à aucun autre plan, mis à part l’armée de Rochambeau, Quand Monsieur de Rochambeau reçut par La Concorde l’information de l’amiral de Grasse, en baie de Chesapeake, Washington, le cœur brisé, voulut envoyer Monsieur Du Portail auprès de l’amiral, pour lui demander de revenir sur New-York. Mais le Général français lui a opposé que les Anglais avaient reçu 3.000 hommes à New-York et étaient inattaquables à cet endroit.»

Selon Desandroin, ce que confirme Lauberdière, Rochambeau fit remarquer que De Grasse était venu en Virginie à sa demande et a dit à Washington que « pour cette raison, il ne pouvait pas refuser de marcher immédiatement avec les troupes françaises.
Washington était libre de suivre son idée, mais Rochambeau invita Washington  à se placer à la tête de l’armée française et de faire en sorte que l’armée américaine les suive et se retire de New-York.  Quand Washington exprima sa crainte  que l’armée ne se révoltât contre l’idée de marcher vers le sud, Rochambeau répondit que au moins les soldats de Rhode Island, le régiment canadien commandé par le colonel Tigen (c.a.d. Hazen) et la majeure partie des troupes du Congrès suivraient les Français et il ajouta que, s’il avait besoin de fonds de notre armée pour déplacer la sienne, il était prêt à lui fournir cette possibilité. En fait, il lui a offert 50.000 Ecus. Finalement, Washington a cédé. Mais rien ne fut plus convaincant que la proposition faite par notre Général de se mettre sous ses ordres. On voit que l’opération la plus décisive de toute cette guerre est due à l’obstination et au bon jugement de Monsieur de Rochambeau. J’ai reçu ces informations de lui en personne et je les ai écrites directement aussitôt après les avoir entendues de sa propre voix. » (fin de Desandroin)

Si ces journaux suggèrent la possibilité que les Français partent seuls, le journal du Vicomte, le fils de Rochambeau, est encore plus explicite. Quand la lettre de de Grasse est arrivée au camp le 14 août, « le moment était venu d’éclairer le Général Washington et de le persuader de mener les opérations dans le sud. Mon père a envoyé le Brigadier général Du Portail, lui a fait part de toutes ses idées, qu’il a totalement approuvées, et lui a demandé d’user de son influence sur le commandant américain pour les lui faire adopter. Il se donna à cette tâche avec zèle et enthousiasme ; mais, voyant l’indécision et les hésitations de ce dernier, il devina que la fierté expliquait son refus. Le général Rochambeau, se sacrifiant au bien qui résulterait de cette manœuvre, proposa au Général Américain, de venir commander lui-même l’expédition. Dès, lors, les obstacles étaient levés, la marche vers le sud était décidée et définitivement planifiée »

Duportail avait bien été présent à la réunion, ce q’une note du 5 août a mis en évidence, quand Duportail a envoyé à Washington ses « observations générales sur la manière de passer l’ile de New-York » datée du 27 juillet, avec la proposition d’attaquer New-York, si besoin était, sans le soutien d’une flotte française. La note disait :

« Cher Général,

« J’envoie à votre Excellence, selon vos instructions, les quelques observations générales que j’ai faites après notre reconnaissance de l’ile de New-York, bien que la nouvelle que nous avons eue hier m’ait fait craindre son inutilité. Vos autres plans sont probablement faits, mais il n’est pas avantageux de poursuivre la préparation de l’attaque de New-york, de même que de tromper notre armée et tromper l’ennemi – J’ai bien peur que nous ne fassions pas cette campagne sous le sceau du  secret – si l’ennemi perçoit que nous abandonnons l’idée d’attaquer New York, ils vont renforcer Portsmouth en Virginie, peut-être avant que nous y arrivions. »

Du Portail était l’un des très rares à avoir l’information et il est fort probable qu’il était à la réunion.

 Malheureusement, nous n’avons que des sources françaises pour connaître ce qui s’est passé à la réunion – Si quelqu’un a un récit d’un participant américain, s’il vous plait, partagez-le ! – et seule confirmation américaine : celle que Washington a écrit dans son journal et dans des lettres telles que celle qu’il écrivit une semaine plus tard, le 22 août 1781 au Gouverneur Trumbell de King’s Ferry.

« Je suis désolé de devoir informer votre Excellence que les circonstances dans lesquelles je me suis trouvé récemment m’ont conduit à modifier le but principal qui avait été adopté tout d’abord, et jusqu’à présent été maintenu, pour les opérations à venir de cette campagne. »

« Désolé » est un grand euphémisme de la part de Washington : même si les sources françaises sont à prendre avec des pincettes- Rochambeau est plutôt circonspect dans ses mémoires- le 14 août, Washington a été forcé d’admettre cette pénible réalité, que, même s’il était nommément commandant en chef, il était également le plus faible lien militaire dans le triumvirat avec Rochambeau et de Grasse – et ils le savaient tous…

Comme l’écrit l’historien Edward G. Lengel « Aucune des décisions que Washington a prises pendant sa longue carrière militaire, aucune ne fut plus importante que celle-ci. Marcher vers le sud fatiguerait son armée et laisserait ouverte la vallée de l’Hudson à toute attaque britannique – tout cela à cause de la promesse d’une aide française qui pouvait être ou ne pas être tenue ». [voir « General Georges Washington, une vie de militaire (Random house : New-York pp. 333/334).

Il était beaucoup plus facile pour le ministre français de la Luzerne ou pour Rochambeau d’être favorable à une marche vers Yorktown : Si le projet aboutissait- formidable ! Sinon, le pire qui puisse arriver serait que Rochambeau et ses forces soient battus, que ce dernier soit fait prisonnier et renvoyé en France après la paix.

Pour les Américains, l’échec de la campagne de 1781 signifierait la fin de leur combat pour l’indépendance. Ils ne pourraient par rentrer chez eux et continuer comme auparavant. L’Amérique était leur pays.

Leur avenir dépendait de la réussite de cette campagne. A la fin, ce qui compte, est que Washington ait  pris  la décision qu’il devait prendre, décision qui était la sienne et seulement la sienne. Il porterait la responsabilité de la victoire ou de la défaite. Il était le commandant en chef. Rétrospectivement, nous savons qu’il a pris la bonne décision. La victoire de Yorktown signifiait que les Etats-Unis deviendraient une nation indépendante et finalement la nation la plus puissante sur terre.


Des nouvelles des élèves et du drapeau patriotique

Voici quelques nouvelles des jeunes du lycée Rochambeau

Le drapeau du club est maintenant bien installé et connu au sein de la communauté franco-américaine.

La mission défense de l’ambassade et les attachés défense sont ravis de la présence des élèves

Voici des photos prises lors de la cérémonie du  novembre à l’ambassade de France à Washington